Tempête Xynthia : ils témoignent
Retour sur la mobilisation des acteurs départementaux lors de cette nuit du 27 au 28 février 2010.

"Il y a 10 ans, j’étais sapeur-pompier, plongeur à La Rochelle. Le soir de la tempête, je n’étais pas de garde, j’étais chez moi lorsque mon Bip a sonné à 3h du matin pour me dire de me rendre à la caserne. Comme moi, tous les pompiers de repos ont été appelés ce soir-là.
Une fois sur place, j’ai reçu l’instruction de partir avec 2 collègues, route de la plage à Aytré car il y avait des personnes à secourir sur les toits des mobile-homes du camping et dans les habitations avoisinantes, à cause de la montée des eaux. La route était inondée pour accéder au camping, nous avons dû laisser notre véhicule en chemin. Les fortes vagues qui retournaient les mobile-homes les uns sur les autres nous ont empêché de nous servir de notre embarcation. C’est donc à la nage que nous sommes allés aider ces personnes coincées dans leurs habitations. Après 5h dans l’eau, nous avons réussi à mettre à l’abri une quarantaine de personnes.
Depuis Xynthia, nous avons adapté nos formations au risque de submersion en organisant régulièrement des initiations de sauvetage en eaux vives pour les sapeurs-pompiers. Nous nous sommes également équipés de gilets de sauvetage spécifiques qui nous protègent des obstacles."

"Cette nuit là, le monde paraissait figé, la mer était montée dans les terres, avait fait disparaître des routes et la 2x2 voies La Rochelle/Rochefort était coupée à plusieurs endroits. Premiers arrivés sur les lieux, mes collègues d'astreinte ont découvert l'ampleur des dégâts : routes inondées, usagers paniqués ou hagards, certains sur le toit de leur voiture. Ils ont aidé des gens à sortir de l'eau, guidé d'autres à l'aide de leurs lampes, afin qu'ils nagent jusqu'à eux...
Heureusement, notre système de radio interne a continué de fonctionner, nous permettant de coordonner l'intervention des équipes, le réseau téléphonique étant hors-service. Nous avons dû, dans l'urgence, barrer des routes, mettre en place des déviations, tronçonner et dégager des arbres. Nous avons essayé tant bien que mal de rétablir un semblant de circulation et ouvert un corridor emprunté uniquement par les secours et la sécurité civile.
Nous avons ensuite passé des semaines à remettre en ordre le réseau routier, évacué des tonnes de débris charriés par la mer. Et à l'aide de véhicules équipés de bennes, nous aidions les habitants des communes les plus sinistrées, comme Charron, à débarrasser et nettoyer leurs habitations entièrement ravagées par les flots."

"J'ai participé à la gestion de crise de Xynthia dès 3h du matin en faisant le lien entre les remontées terrain faisant état des dégâts sur les digues, et les moyens opérationnels des entreprises de travaux publics avec lesquelles nous travaillions à l'époque. Certaines entreprises m'ont contacté spontanément pour participer à l'effort collectif. L'objectif était de ne pas envoyer tous les moyens aux mêmes endroits et de prioriser les réparations sur les secteurs où il y avait le plus d'enjeux humains, la marée remontant fortement dès la fin d'après-midi.
Après la tempête, environ 70 secteurs ont fait l'objet de travaux d'urgence en 2010 et 2011.
Suite à ça, un programme d’ouvrages de protection contre les submersions marines a été mis en place. Depuis, mon rôle est d'assurer la conduite de projet de ce plan digues afin de mettre en place les financements, faire concevoir les ouvrages de protection et obtenir les autorisations règlementaires. À ce jour, 15 systèmes complets de protection ont pu être portés à un niveau correspondant à un évènement de type Xynthia + 20 cm."

"Xynthia, une expérience professionnelle que je n'oublierai jamais : environ 2000 personnes à reloger ou à accompagner pour remettre leur logement en état, à rééquiper... mais avant tout, 2000 personnes à écouter tellement le traumatisme a pu être important. Xynthia, c'était d'abord une cellule de crise puis la mise en place d'une MOUS ( Maitrise d'œuvre urbaine et sociale ), une très grande mobilisation de tous les services et des élus, un moment marquant d'entraide entre collègues, avec une devise "MOUS toujours".