Les mémoires de l’Ancienne école de médecine navale
Devenue musée en 1998, l’École de médecine navale de Rochefort, première du genre au monde, raconte plusieurs décennies d’une aventure scientifique et humaine destinée à former les chirurgiens embarqués à bord des navires de guerre.
C’est au cœur du XVIIe siècle que Rochefort vit sa plus spectaculaire transformation. Á la demande de Louis XIV, un arsenal sort de terre au bord du fleuve Charente pour constuire, armer et entretenir des vaisseaux dédiés à la conquête et à l’exploration des océans, faisant de la paisible bourgade une ville militaire où vont se presser les familles d’artisans et d’ouvriers affectés aux différents chantiers navaux. Couplée à la situation géographique du site implanté en zone humide et marécageuse, cette expansion démographique favorise alors la propagation de maladies et d’épidémies. Il faut agir contre ce problème sanitaire majeur, et c’est ce qui est fait dès 1683 avec, notamment, l’ouverture d’un hôpital d’une capacité de 400 lits au cœur de la cité rochefortaise.
Faisant écho à ces solutions pour améliorer les conditions de vie locales à terre, la Marine Royale se questionne à la même époque sur la structuration et la professionnalisation des soins en mer. Nommé premier médecin du port de Rochefort en 1712, Jean Cochon-Dupuy va porter le projet d’y créer la première école française d’anatomie et de chirurgie, et d’ainsi former officiellement les chirurgiens destinés à soigner en mer les équipages et à exercer à terre entre les expéditions. Ouverte dans l’hôpital en 1722, l’école devient vite modèle pour les autres arsenaux royaux comme celui de Toulon et de Brest. Si des cours théoriques y sont prodigués, la pratique prévaut pour les élèves appelés, après 4 années d’études, à être opérationnels à bord. Capables de diagnostiquer comme médecin, de préparer et d’administrer des remèdes comme pharmacien, les praticiens accompagnant les expéditions maritimes doivent également savoir opérer comme chirurgien.
Un musée unique sur trois niveaux
Peu à peu, le site va s’enrichir régulièrement de collections scientifiques et techniques ayant pour fonction de servir de supports aux enseignements dispensés. Miraculeusement préservées au fil des siècles, celles-ci sont de nos jours présentées au dernier étage du pavillon A de l’ancien hôpital de la Marine désormais ouvert tous les jours au grand public. Ici, entre la collection d’ostéologie pour l’étude des fractures du fémur, les instruments chirurgicaux, les plantes et graines issues du jardin botanique local ou collectées lors des navigations, c’est un véritable voyage dans le temps qui est proposé aux visiteurs. Aujourd’hui pourvue de 25 000 ouvrages traitant d’anatomie, de maladies tropicales, de dermatologie, de chimie, de physique, ou encore d’histoire, de géographie, de botanique et même de philosophie, la bibliothèque située au premier étage incarne aussi ce lieu de mémoire unique. Au premier niveau, là où les actes de chirurgie se déroulaient, les hommes représentés sont autant de personnalités qui ont marqué l’histoire des lieux par leurs contributions scientifiques, leurs participations à des campagnes militaires et des voyages d’exploration. Rattachée au musée national de la Marine, l’Ancienne école de marine navale de Rochefort constitue ainsi un témoignage précieux de la naissance de la médecine dédiée aux gens de mer et de la richesse du territoire en matière d’histoire des sciences.
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