Légende : Marie Mancini, celle qui fit de Brouage la clé du destin de Louis XIV
Découvrez une illustration de Marie Mancini réalisée spécialement pour le Département par la charentaise-maritime Anna Wanda Gogusey.

Au temps de Louis XIV les affaires de cœur sont cruelles et ne pèsent rien face à la raison d’État. À l’aube de l’été, alors que depuis les remparts elle jette un regard perdu sur la plaine de Brouage, Marie Mancini, 20 ans, nièce de Mazarin et premier amour du roi, en fait l’amère expérience.
Rien pourtant ne destinait cette noble italienne au charme anachronique et au caractère affirmé à subir une telle infortune. De ces cinq sœurs venues de Rome à la demande de leur oncle, les courtisans de l’époque auraient plutôt accordé à Hortense, l’aînée, les faveurs du jeune Roi Louis XIV. Mais si elle n’a pas la blondeur et les rondeurs de l’époque, Marie a pour elle un esprit vif et cultivé qui ne tarde pas à faire tourner la tête du monarque. Ils ont en commun leur amour de Sénèque et l’envie d’aventure. Bientôt leurs entrevues fugaces laisseront place aux lettres enflammées.
Même s’il reste platonique, cet amour naissant inquiète en haut lieu. On destine le roi à un mariage politique. Bien que de belle naissance, Marie n’est pas d’une lignée à même de consolider le royaume. On pense plutôt à l’infante d’Espagne qui permettrait de nouer une alliance bien plus profitable. Il s’agit alors d’éloigner l’encombrante.
Sur ordre du Cardinal Mazarin, c’est donc au sein de la garnison de Brouage que Marie trouve un refuge contraint en compagnie de deux de ses sœurs. Pour la petite ville, c’est un événement sans pareil. Plus habituée aux sons des bottes de soldats qu’aux robes raffinées, la citadelle met tout en œuvre pour offrir le meilleur des accueils. Marie invite des courtisanes de La Rochelle et les fêtes vont bon train pour tenter d’apprivoiser l’oubli. Mais les 19 ans du roi ne font que renforcer sa ferveur. Il continue d’écrire en bravant l’interdit et fait même parvenir à sa dulcinée un petit chien au collier gravé : « À Marie Mancini ».
Il faudra toute la force de persuasion et la ruse de Mazarin pour enfin convaincre les deux amoureux de renoncer à leur idylle. On promet à Marie un mariage avec le Prince italien Colonna qu’elle accepte la mort dans l’âme. On oppose au roi l’intérêt supérieur du royaume : pour lui, ce sera Marie-Thérèse d’Autriche. Deux mois plus tard, Marie quitte la France pour l’Italie.
L’épilogue de cet épisode a lieu quelques semaines plus tard, lorsque Louis XIV revenant d’Espagne pour se rendre à Paris, émet le désir de s’arrêter à Brouage. Il veut visiter le lieu, où Marie a vécu, impuissante, la mort de leur histoire. On rapporte qu’il y a pleuré de longues heures, du haut des remparts. Comme tant de fois avant lui son amour perdu.
Et c’est ainsi que la petite citadelle fut pendant 7 mois l’épicentre du destin de la France et le témoin muet d’une histoire d’amour qui naïvement rêvait à son avenir. Pour les deux amoureux comme pour la ville, rien après ne serait comme avant.
L'illustratrice
Cette illustration de Marie Mancini a été réalisée spécialement pour le Département par la charentaise-maritime Anna Wanda Gogusey. Diplômée de l’école Olivier de Serres, fondatrice de Retard Magazine et de la marque Unseven, elle exprime ses talents en tant qu’illustratrice, tatoueuse et Directrice artistique.
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